top of page

Jeûner contre le cancer ?

Regain d'énergie, meilleur sommeil, détox et purification de l'organisme... Depuis quelques années, les fervents défenseurs du jeûne mettent en avant de nombreux bénéfices pour justifier ces périodes d'abstinence alimentaire jugées indispensables pour que l'Homme remette son corps au coeur de l'équation vitale. Présenté comme un véritable remède pour les maux du corps et de l'esprit, le jeûne serait même thérapeutique et pourrait ainsi aider les patients atteints d'un cancer à redevenir acteurs de leur parcours de soin oncologique. Info ou Intox* ?


* On a hésité à faire un jeu de mot avec intoxication alimentaire et puis on s'est dit que c'était trop tôt.

jeûne et cancer


Les différents types de jeûne


Défini comme l'arrêt complet de la prise alimentaire sans restriction de l'apport en eau, le jeûne peut se pratiquer sur une durée plus ou moins longue. On parle de jeûne intermittent lorsque le jeûne est effectué quotidiennement sur une période de 16 heures, de jeûne périodique lorsque la période de restriction dépasse 48 heures et même de jeûne absolu ou "sec" lorsqu'il implique un arrêt de la prise alimentaire et de l'apport en eau.


Originellement, le jeûne est présent dans la nature chez les animaux qui auront tendance à réduire leurs apports nutritionnels lorsqu'ils sont malades, blessés ou encore en phase d'hibernation.


Historiquement, c'est également une tradition commune aux trois grandes religions monothéistes (Carême pour le Christianisme, Ramadan pour l'Islam et Yom Kippour pour le Judaïsme) où il symbolise le recentrage spirituel et une ouverture au partage. Également présent au sein des religions Hindouiste et Bouddhiste, le jeûne fait parti des tapas, ces exercices d'ascèse qui impliquent des efforts d'austérité jugés nécessaires pour atteindre le but suprême que l'on s’est auto-assigné.



jeûne et cancer

Depuis plusieurs années, le jeûne s'est éloigné des considérations religieuses pour devenir une discipline bien-être à part entière. Etroitement lié au monde du Yoga, on le consomme sous forme de séjours méditatifs où il est présenté comme un vecteur de rapprochement à son moi-intérieur et comme un retour à la gestion du manque que le corps serait plus apte à supporter que la gestion de l'excès (alimentaire). Il promet une élimination des toxines et des mauvaises graisses, une purification de la peau, une diminution des douleurs chroniques ainsi qu'un grand nettoyage de l'esprit pour le débarrasser des pensées parasites. Une sorte de grand ménage intérieur qui permettrait au corps de se régénérer pour optimiser son fonctionnement dans la vie de tous les jours et dans sa lutte éventuelle contre la maladie.



Les avantages supposés du jeûne contre le cancer


Pas étonnant donc que le jeûne puisse être présenté comme une thérapie complémentaire dans le cadre du parcours de soin contre le cancer. Dans ce contexte oncologique, il permettrait ainsi d'augmenter l'efficacité des traitements et les chances de guérison tout en retardant la croissance des cellules cancéreuses. La théorie mise en avant ? Les cellules saines seraient aptes à résister à la privation d'énergie inhérente au jeûne tandis que les cellules cancéreuses n'y survivraient pas, le jeûne venant générer des "cassures" destructrices au sein de leur ADN. C'est notamment l'objet des travaux du chercheur et entrepreneur Valter Longo, l'un des ambassadeurs de cette idéologie depuis les années 1990.


Longo n'est pas le seul défenseur de cette thérapie du jeûne puisqu'en 2017, un rapport de l'Institut National du Cancer (INCa) recensait pas moins de 224 publications scientifiques ayant pour objet l'efficacité du jeûne contre le cancer. Le bémol : 200 d'entre elles portent sur un sujet animal - principalement des souris. Leurs résultats ne sont donc pas transposables chez l'Homme bien qu'ils puissent dessiner des hypothèses et des pistes de réflexion encourageantes.

L'Homme est le sujet d'étude des 24 publications restantes mais ces dernières sont construites autour de méthodologies jugées insuffisantes pour que leurs résultats puissent être considérés comme pertinents.


jeûner pendant son cancer ?

Une nouvelle étude datant de 2020 tire cependant son épingle du jeu puisqu'elle porte sur un groupe plus consistent de 129 patientes - humaines - atteintes d'un cancer du sein. Considérée par les experts scientifiques comme l'unique étude qui "tienne la route", ses résultats démontrent que le jeûne n'améliore pas la toxicité de la chimiothérapie, mais permettrait une meilleure survie sans progression de la maladie si l'on observe la croissance de la tumeur par radiologie. Le Dr Bruno Raynard, gastro-entérologue et chef de l'unité transversale de diététique et de nutrition à l'Institut Gustave Roussy (Paris), relativise cependant les résultats de cette étude récente en précisant que cette survie sans progression reste factuellement non expliquée.


"Il manque beaucoup de données pour juger de l'effet réel du jeûne étudié, comme l'état nutritionnel préalable des patients, leurs ingesta notamment protéiques, et leur niveau d'activité physique. Ces trois critères étant des facteurs éminemment importants pour juger de l'effet pronostique d'un support nutritionnel." [1]

[1] Jeûne et cancer : des résultats favorables mais avec "des incohérences et imprécisions" - Sciences et avenir


Conclusion ? Difficile aujourd'hui de se prononcer sur les véritables effets du jeûne et d'autant plus lorsque ce dernier est associé à l'efficacité, voir même dans certains extrêmes à la substitution, des traitements contre le cancer.



Les dangers du jeûne en oncologie


Bien que le jeûne reste dans la grande majorité des cas une pratique inoffensive pour les sujets en bonne santé - et certainement bénéfique à certains égards pour le corps et l'esprit -, il n'en est pas moins risqué pour les patients en cours de traitement contre un cancer.


Risque de dénutrition


La plupart des études cliniques citées ci-dessus s'accordent pour mettre en avant une perte de poids significative induite par l'acte de jeûne. Etroitement lié au risque de dénutrition dans le cadre d'un cancer, cet amaigrissement peut induire une dégradation de l'état général du patient. Complication fréquente de certains traitements, la dénutrition est un danger qui peut altérer sévèrement la qualité de vie du patient et la réponse de son organisme aux traitements oncologiques, et donc son pronostic.


Pour un même cancer au même stade, un patient dénutri a un risque de mortalité plus important qu’un patient non dénutri.

Risque de sarcopénie


La sarcopénie correspond à une diminution significative de la masse et de la force musculaire. Outre la diminution évidente des capacités physiques du patient, cette perte de muscle déclenchée par le jeûne peut également diminuer la tolérance des traitements de chimiothérapie obligeant parfois l'équipe médicale à réduire le nombre de cycles de chimiothérapie du patient et donc le degré d'efficacité du traitement.



 


Si vous souhaitez tout de même vous initier au jeûne au cours de votre traitement oncologique, il vous sera impératif d'en avertir votre oncologue et votre médecin traitant afin que ces derniers puissent monitorer votre état de santé diététique et nutritionnelle pour évaluer les risques potentiels du jeûne dans le cadre de votre parcours de soin contre le cancer.



Nous espérons vous avoir donné les pistes de réflexion nécessaires à une étude personnelle peut-être plus approfondie qui vous permettra de vous faire votre propre opinion sur la question du jeûne. Et à toutes celles qui souhaiteraient malgré tout tenter l'expérience, n'oubliez pas l'accent sur le u lorsque vous en informerez vos proches : " Je vais me faire un petit jeune !".



Prenez soin de vous,

Tendrement.





 

PS: Renée n'est en aucun cas rémunérée ou sponsorisée par les marques, produits ou intervenants cités dans cet article. Il s'agit de recommandations non exhaustives basées sur nos recherches.








67 vues0 commentaire

Posts similaires

Voir tout
bottom of page